Les aciers pour applications électrotechniques

Qu’est-ce qu’un acier pour applications électrotechniques ?

En première approche, les aciers pour applications électrotechniques peuvent être considérés comme des matériaux ferromagnétiques, acquérant un niveau d’aimantation non négligeable (de l’ordre du Tesla) lorsqu’ils sont soumis à un champ magnétique. L’aimantation ou sa variation, sous l’action d’un champ magnétique, les rendent aptes à des utilisations dans la production, le transport et la transformation de l’énergie électrique.

L’acier devient aimanté sous l’effet d’un champ magnétique : il est dit doux, à l’inverse d’un matériau magnétiquement dur – appelé aimant – qui conserve une aimantation significative après disparition du champ magnétique externe. Le matériau magnétique doux est caractérisé par sa « dureté » magnétique appelée aussi champ coercitif Hc  dont la limite supérieure se situe vers 1 à 10 kA/m (domaine des « doux/durs » ou semi-rémanent) au delà de laquelle se situent les aimants.

Les matériaux magnétiques doux ont une grande perméabilité au champ magnétique, s’aimantent et se désaimantent facilement; c’est le matériau utilisé dans un régime électrique alternatif.

L’essentiel du volume de production des matériaux magnétiques doux est représenté par les tôles magnétiques (dites aussi acier électrique, electrical steel sheet, en anglais). Cet acier est défini dans la norme NF C01-221 comme une tôle d’acier magnétique doux destinée aux applications électromagnétiques.

On se reportera aux normes NF C01-221 et NF C01-121, normes françaises correspondant aux parties 221 et 121 du Vocabulaire Electrotechnique International (CEI 60050) pour compléter les définitions concernant ce domaine.

Existe-t-il une classification de ces aciers ?

Les aciers pour applications électrotechniques ne comprennent que des produits magnétiques doux. Le champ coercitif Hc n’est plus que quelques centaines d’ampères/mètres. C’est dans ce groupe que l’on trouve les tôles magnétiques en « acier électrique FeSi » (acier pur contenant jusqu’à 3% de silicium en poids et parfois un peu d’aluminium) que l’on sépare en :

●    Tôles à grains orientés dites GO. Elles sont constitués d’un alliage fer-silicum (~3 %), revêtu d’un « glassfilm » à base de forstérite complété d’un revêtement inorganique de type phosphate. Leur process de fabrication comprend de multiples étapes thermo-mécaniques et vise à développer une texture spécifique appelée « texture de Goss ». Cette texture confère de bonnes performances en pertes et perméabilité dans le sens de laminage de la tôle. Ces tôles présentent une polarisation magnétique élevée à saturation et des pertes spécifiques très basses. Les aciers GO sont bien adaptés pour une utilisation en champ unidirectionnel comme dans les machines statiques telles que les transformateurs pour lesquels les rendements électriques visés sont très élevés. Elles sont par contre peu performantes dans le cas des machines tournantes traditionnelles mais le sont dans les gros générateurs et alternateurs. Leurs caractéristiques sont spécifiées dans la norme NF EN 10107. Cette norme distingue deux classes de matériaux :

–         matériau à grains orientés conventionnel

–         matériau à grains orientés à haute perméabilité, qui présente des propriétés améliorées, notamment une plus faible consommation électrique à vide, intéressantes pour les transformateurs de puissance.

●    Tôles à grains non orientés dites NONO. Elles sont adaptées aux machines tournantes (générateurs, alternateurs, moteurs). Une segmentation complémentaire les différencie suivant les états de livraison :

◦     État « prêt à l’emploi » (fully-process). Les tôles livrées possèdent déjà les caractéristiques magnétiques finales et une isolation électrique par un revêtement. Ces tôles sont en acier plus ou moins allié en silicium (2-3% de silicium) pour réduire les pertes magnétiques, et sont assez bien adaptées à la découpe et à la mise en œuvre finale grâce à leur revêtement spécifique. La découpe de ce matériau doit se faire en minimisant les dégradations (aucun recuit ultérieur n’est généralement appliqué). Elles sont adaptées aux machines tournantes. Leurs caractéristiques sont précisées dans la norme NF EN 10106. Dans le contexte de la directive européenne cherchant à augmenter les efficacités des machines industrielles (Directive Ecodesign 2009/125/CE), elles sont de plus en plus souvent vernies. Cette isolation (voir NF EN 10342) permet de réduire les pertes interlamellaires.

◦     État semi-fini (semi-process). Ces tôles offrent une très bonne aptitude à la découpe mais demandent ensuite un recuit final de recristallisation (croissance de grain) ainsi qu’éventuellement des étapes de décarburation poussée et de bleuissement. La couche bleuie remplit alors le rôle d’isolation de surface (voir NF EN 10342). Leurs caractéristiques font l’objet de la norme NF EN 10341.

Les cas particuliers des produits FeSi extra-minces pour utilisation à moyenne fréquence, des produits utilisés pour les pôles et jantes des machines électriques (caractéristiques mécaniques et perméabilité magnétique garanties) et des produits utilisés pour relais font respectivement l’objet des normes NF EN 10303, NF EN 10265 et NF EN 10304. Les produits extra-minces pour utilisation à moyenne fréquence étaient surtout dédiés aux micromoteurs, mais prennent de plus en plus d’intérêt dans le domaine de la traction de véhicules électriques.

Dans les produits magnétiques doux il faut également citer, en plus des aciers, les alliages fer-nickel proposant une large gamme d’alliages à basse consommation d’énergie, à haute et très haute perméabilité, les alliages fer-cobalt à très haute saturation magnétique (gain de densité de puissance massique ou volumique) utilisés notamment dans l’aéronautique. Les métaux magnétiques doux frittés qui sont utilisés pour des composants réalisés uniquement par la métallurgie des poudres font l’objet de la norme NF EN 10331. Enfin quoique non ou partiellement cristallins, les amorphes magnétiques et les alliages nanocristallins base fer offrent de hautes perméabilités et basses pertes magnétiques en moyenne fréquence pour de plus hautes inductions de travail que les ferrites, et occupent une part croissante des applications techniques de niche dans les domaines des capteurs, des composants magnétiques passifs pour l’électronique de puissance, du blindage…

Quels sont les principales caractéristiques recherchée ?

Pour les aciers magnétiques doux, on recherche, sous l’action d’un champ magnétique, à répondre en aimantation et induction rapidement aux sollicitations extérieures et canaliser le flux magnétique avec des pertes d’énergie minimales.

Les grandeurs magnétiques d’intérêt sont alors les pertes totales massiques, la polarisation (ou aimantation) et induction magnétique, l’anisotropie de ces propriétés dans le plan de tôle, ou la perméabilité magnétique.

Ces grandeurs magnétiques varient toutes plus ou moins significativement avec la composition chimique, la texture, la taille de grain, l’épaisseur de tôle, le revêtement isolant ou d’autres effets de surface, l’impact d’un traitement superficiel d’affinement des domaines magnétiques (traitement laser).

En complément, on prend en compte des aspects de mise en œuvre (aptitude à la découpe, pliage) et de fonctionnement (conductivité thermique par exemple dans le cadre de l’évacuation des pertes d’énergie).

Enfin, on tient compte d’aspect tel que le vieillissement magnétique.

Quels sont les secteurs utilisateurs ?

Comme évoqué précédemment il faut distinguer,

●    Pour les produits plats :

◦     l’application de culasse magnétique des machines statiques telles que les transformateurs correspondant aux tôles FeSi à grains orientés pour les moyens à gros transformateurs à tôles empilées ou enroulées, aux tôles à grains non orientées pour les plus petits transformateurs à pièces poinçonnées en E+I, pour les électroaimants

◦     les applications dans les machines tournantes où les tôles FeSi à grains non orientés sont utilisées en noyau magnétique feuilleté pour les moteurs électriques, alternateurs, compresseurs. Ces tôles peuvent être également employées dans la construction de relais électromagnétiques, de petits transformateurs, de ballasts de tubes fluorescents, de compteurs électriques

◦     les applications à haute densité de puissance (génératrices, transformateurs, actionneurs dans les domaines embarqués du spatial, aéronautique, automobile) des alliages fer-cobalt

◦     les applications à basse consommation de champ ou d’énergie (relais haute sensibilité, capteurs divers, transformateurs de mesure, blindage haute efficacité, chauffage par induction, compensation de flux, composants magnétiques passifs) des alliages ultra-doux : fer-nickel, nanocristallins, amorphes magnétiques

◦     on suivra enfin le développement des produits adaptés au cas de l’automobile à traction électrique comme la gamme iCARe™ développée par ArcelorMittal ou la gamme PowerCore® de ThyssenKrupp.

●    Pour les produits longs : les applications sous forme d’électro-aimants divers, de noyaux d’inductance, de relais, de capteur.

Quels sont les producteurs ?

●    Le groupe ArcelorMittal avec différentes unités de production en France : coils à chaud à Fos et Dunkerque, fully-process à St.-Chély d’Apcher et Florange, semi-process à Florange (voir la page dédiée sur le site ArcelorMittal ou la page concernant l’offre de ce groupe sur ce segment de produits) et notamment le site de Saint Chély d’Apcher.

●    La société Thyssen Krupp Electrical Steel UGO à Isbergues du groupe Thyssen Krupp.

●    Le groupe Aperam qui au travers d’activités non européennes est présent sur le marché des produits plats.

●    La société Aperam Alloys Imphy commercialise une très large gamme d’alliages et la société Aperam Alloys Amilly propose de nombreux produits issus de la transformation de produits magnétiques.